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2025/3
Guides de pratique clinique
Céphalées des enfants et adolescent(e)s : pertinence de l’imagerie
11/12/2024
Libre d'accès

  • Devant toute céphalée, il est nécessaire de réaliser une anamnèse et un examen physique rigoureux, notamment neurologique.
  • En présence d'un ou plusieurs drapeaux rouges à l'examen clinique :
    • une imagerie cérébrale est indiquée (suspicion d'une pathologie intracrânienne potentiellement grave)
    • le choix et le délai de réalisation de l'imagerie dépendent du ou des drapeaux rouges présents :
      • IRM cérébrale en 1e intention dans la plupart des cas
      • Scanner cérébral en 1e intention en cas de : état clinique instable, trouble de la conscience, céphalée en coup de tonnerre, ou suspicion de méningoencéphalite, abcès ou empyème avec une porte d'entrée ORL en l'absence de signe neurologique focal
      • en cas d'indisponibilité de l'IRM malgré l'indication : voir le tableau de synthèse
  • La très grande majorité des céphalées sont des céphalées primaires
    ​​non attribuable à une anomalie pouvant être détectée (structurelle, vasculaire, métabolique…)
    (migraine et/ou céphalée de tension) ou secondaires
    ​​symptôme d’une maladie sous-jacente
    à un épisode fébrile bénin : en l'absence de drapeau rouge, l'imagerie n'est pas indiquée.
  • Une imagerie injustifiée ou inadaptée expose inutilement l'enfant, notamment :
    • aux risques des rayonnements ionisants lors du scanner
    • à la découverte d' incidentalome
      anomalie de découverte fortuite sans lien avec la symptomatologie ayant motivé l’imagerie, dans la majorité des cas sans valeur pathologique
      à l'IRM
  • Un document d'information pour les parents peut faciliter la discussion lorsqu'il n'y a pas d'indication à réaliser une imagerie.
Ne sont pas abordées dans ce guide les indications d'imagerie en cas de céphalée :
  • dans un contexte aigu de traumatisme crânien
  • avec suspicion de méningite : puisque l'imagerie n'est pas indiquée pour le diagnostic positif (qui est réalisé avec la ponction lombaire) mais pour le diagnostic différentiel (encéphalite, processus expansif)

Figure 1. Arbre décisionnel pour les médecins généralistes et pédiatres de ville : céphalées de l'enfant et l'adolescent : indications de l'imagerie cérébrale
Figure 1. Arbre décisionnel pour les médecins généralistes et pédiatres de ville : céphalées de l'enfant et l'adolescent : indications de l'imagerie cérébrale
voir l'arbre décisionnel en PDF

  • Au sujet des céphalées :
    • elles sont un symptôme fréquent chez les enfants et adolescent(e)s : 50 à 60 % des enfants seraient concernés
    • elles sont plus fréquentes chez les filles que chez les garçons
    • la prévalence augmente avec l'âge
  • Les migraines :
    • ont une prévalence de 5 à 10 % chez les enfants et adolescent(e)s
    • l'âge moyen de survenue est de 6,7 ans
  • Les céphalées de tension chez les enfants/adolescent(e)s ont une prévalence s'élevant jusqu'à 33 % selon les études.
  • Les céphalées secondaires à une tumeur cérébrale, une hypertension intracrânienne (HTIC), une infection intracrânienne ou un AVC sont très peu fréquentes.
  • 16 % des IRM cérébrales pédiatriques trouvent des incidentalomes
    ​anomalies de découverte fortuite sans lien avec la symptomatologie ayant motivé l’imagerie, dans la majorité des cas n’ayant pas de valeur pathologique.
    n'ayant pas de valeur pathologique dans la majorité des cas.

Les principales étiologies des céphalées des enfants et adolescent(e)s se répartissent en :
  • Céphalées primaires :
    • migraines avec ou sans aura
      La migraine est accompagnée d’une aura dans 30 % à 50 % des cas.
    • céphalées de tension
    • céphalées mixtes associant migraines et céphalées de tension
    • céphalées par abus d'antalgiques
      survient chez un patient ayant une céphalée primaire préexistante, chez qui l’usage excessif du traitement de crise (≥ 10 ou 15 jours/mois selon le médicament) induit la transformation de l’expression épisodique de la céphalée vers une expression chronique.
    • les autres céphalées primaires
      ​​non attribuable à une anomalie pouvant être détectée (structurelle, vasculaire, métabolique…)
      comme les céphalées trigéminovasculaires (dont algie vasculaire de la face) sont exceptionnelles en pédiatrie
  • Céphalées secondaires
    ​​symptôme d’une maladie sous-jacente
    bénignes
    :
    • infection virale bénigne
    • rhinosinusite aiguë
      ​Une sinusite chronique n’est pas une cause de céphalée chez l’enfant : il convient de rechercher une autre étiologie.
    • trouble de la réfraction oculaire
  • Céphalées secondaires non bénignes :
    • tumeur cérébrale
    • hypertension intracrânienne (HTIC) :
      • elle peut être primaire (idiopathique)
      • ou être le symptôme d'une pathologie sous-jacente : tumeur, abcès, hématome, hydrocéphalie, hémorragie méningée, méningite, thrombose veineuse cérébrale, craniosténose, médicaments...
    • hypotension intracrânienne. La céphalée est causée :
      • soit par une faible pression du LCR
      • soit par une fuite du LCR : après une ponction lombaire, une intervention neurochirurgicale, un traumatisme
    • causes infectieuses :
      • infection intracrânienne : méningite, encéphalite, abcès cérébral, empyème
      • sinusite sphénoïdale
    • causes vasculaires :
      • AVC hémorragique
      • AVC ischémique artériel
      • thrombose veineuse cérébrale
    • traumatisme crânien
    • sevrage ou intoxication par une substance : dont intoxication au monoxyde de carbone
    • hypertension artérielle
    • malformation de Chiari de type I
      ​variation morphologique cérébrale caractérisée par une descente des amygdales cérébelleuses d’au moins 5 mm à travers le foramen magnum
      symptomatique

  • Une anamnèse détaillée, un examen physique (notamment neurologique) rigoureux sont indispensables pour distinguer céphalée primaire et céphalée secondaire
  • Le diagnostic d'une céphalée primaire est clinique :
    • le diagnostic de migraine est clinique
    • le diagnostic de céphalée de tension est clinique
    • voir les critères diagnostiques pour migraine et céphalée de tension
  • En présence d'un ou plusieurs drapeaux rouges : une imagerie cérébrale est indiquée : voir l'arbre décisionnel et choix de l'imagerie et délai de réalisation :
    • la présence d'un ou plusieurs drapeaux rouges à l'examen clinique doit faire suspecter une céphalée secondaire à une pathologie intracrânienne potentiellement grave
    • l'imagerie vise à exclure une céphalée secondaire à une pathologie qui nécessite une prise en charge spécifique ou urgente
    • les céphalées secondaires à une tumeur cérébrale, une hypertension intracrânienne, une infection intracrânienne ou un AVC sont presque toujours associées à au moins une anomalie clinique, notamment neurologique
    • dans le cas du traumatisme crânien (hors phase aiguë) : en cas de céphalée post-traumatique, survenant dans les 7 jours après le traumatisme crânien, une imagerie cérébrale est indiquée uniquement en présence d'un ou plusieurs drapeaux rouges
  • En l'absence de drapeau rouge :
    • un avis spécialisé est indiqué dans certaines situations, avant une éventuelle imagerie
    • une IRM cérébrale et de la charnière cranio-cervicale est indiquée sans urgence, à visée diagnostique, si une malformation de Chiari de type I
      ​variation morphologique cérébrale caractérisée par une descente des amygdales cérébelleuses d’au moins 5 mm à travers le foramen magnum
      est suspectée
    • un document d'information pour les parents d'enfant ayant une céphalée peut faciliter la discussion lorsqu'il n'y a pas d'indication à réaliser une imagerie.

Tableau 1. Drapeaux rouges en cas de céphalées de l'enfant motivant la réalisation d'une imagerie cérébrale (hors contexte de traumatisme crânien aigu et de méningite)
Drapeaux rouges Précisions
Céphalée « en coup de tonnerre »
  • Début brutal, très intense, maximale en quelques minutes, inhabituelle
Céphalée et anomalie neurologique, avec ou sans fièvre
  • Trouble de conscience
  • Crise épileptique (hors crise convulsive fébrile entre 6 mois et 5 ans)
  • Changement de comportement
  • Dysfonctionnement cognitif
  • Signe neurologique focal (même transitoire, en dehors des auras migraineuses visuelles)
    • déficit moteur
    • ataxie et trouble de la coordination
    • atteinte des nerfs crâniens (notamment oculomoteurs)
  • Torticolis d'installation progressive, apyrétique, non congénital et non traumatique
Céphalée et signe(s) d'hypertension intracrânienne (HTIC)
  • Vomissements répétés, en jets, en fin de nuit ou matinaux
  • Diplopie horizontale, paralysie du VI uni ou bilatérale, strabisme convergent
  • Oedème papillaire bilatéral au fond d'oeil
  • Signes d'HTIC menaçants : signe d'engagement, trouble neurovégétatif
Céphalée et trouble endocrinien central
  • Symptôme endocrinien : aménorrhée, galactorrhée, diabète insipide 
  • Trouble de la croissance staturo-pondérale
  • Trouble du développement pubertaire (puberté précoce ou retard pubertaire)
Toute céphalée inhabituelle récente et continue, d'intensité croissante
  • Récente = évoluant depuis quelques semaines
  • Même en l'absence d'autre symptôme ou signe

L'entretien vise à distinguer céphalée primaire ou secondaire : une anamnèse rigoureuse est à réaliser, à compléter par l'examen physique.
La présence d'un ou plusieurs drapeaux rouges indique une imagerie cérébrale.

  • Caractéristiques des céphalées :
    • mode d'installation : brutal ou progressif
    • temporalité :
      • aiguë, récurrente, chronique
        céphalée de plus de 3 mois : céphalée primaire présente ≥ 15 jours par mois pendant ≥ 3 mois OU céphalée secondaire présente depuis plus de 3 mois (classification ICHD-3)
      • progressive ou non
    • horaire (au réveil, le soir...) et durée de la crise de céphalée
    • circonstances de survenue : effort, traumatisme crânien récent, stress, fatigue.
    • localisation :
      • unilatérale, diffuse, irradiante
      • fronto-temporale, occipitale...
    • typologie : pulsatile, constrictive...
    • intensité
      l’intensité d’une céphalée n’est pas corrélée à sa gravité
      : légère, moyenne, sévère
    • symptômes associés pendant ou avant la céphalée : digestifs, visuels, neurovégétatifs...
    • une malformation de Chiari de type I
      variation morphologique cérébrale caractérisée par une descente des amygdales cérébelleuses d’au moins 5 mm à travers le foramen magnum
      est suspectée en cas de céphalées récurrentes occipitales ou sous-occipitales, déclenchées par l'effort et cessant dès l'arrêt de l'effort
  • Autres symptômes :
    • fièvre
    • nausées, vomissements
    • symptômes d'hypertension intracrânienne
    • symptômes évocateurs d'une atteinte hypophysaire :
      • aménorrhée
      • galactorrhée
      • diabète insipide
  • Changement de comportement ou des fonctions cognitives :
    • décrochage scolaire
    • troubles du sommeil
    • maladresse récente...
  • Autres données de l'anamnèse :
    • historique des médicaments, notamment antalgiques
    • antécédents personnels et familiaux :
      • drépanocytose
      • cardiopathie
      • thrombophilie
      • immunodépression
      • cancer
      • neurofibromatose
      • dérivation ventriculo-péritonéale
    • environnement psycho-social

L'examen physique (général et neurologique) comporte notamment :

  • Température
  • Tension artérielle : brassard pédiatrique, courbes pédiatriques
    ajout ebmfrance : voir des courbes sur le site de l’AFPA (outil non évalué par la HAS).
  • Poids, taille, périmètre crânien : courbe staturo-pondérale
  • Examen neurologique :
    • niveau de conscience
    • souplesse de la nuque, torticolis
    • nerfs crâniens (dont champ visuel, oculomotricité, réflexe photomoteur)
    • force/tonus musculaire, sensibilité et réflexes
    • marche et équilibre
    • coordination
  • Évaluation du développement pubertaire
  • Examen de la peau :
    • purpura fulminans
    • hématomes, traces de traumatisme
    • taches café au lait (recherche d'un syndrome neurocutané)

  • Le type d'imagerie (IRM ou scanner) et son délai de réalisation dépendent du drapeau rouge présent : voir le tableau de synthèse. Les délais mentionnés correspondent au délai maximal conseillé.
  • L'IRM cérébrale :
    • est l'examen de 1e intention dans la plupart des cas du fait de :
      • sa meilleure sensibilité pour l'exploration du parenchyme cérébral
      • l'absence d'exposition aux rayonnements ionisants
    • pédiatrique, réalisée principalement au CHU, nécessite souvent une sédation, notamment chez l'enfant de moins de 6 ans
  • Le scanner cérébral :
    • est l'examen de 1e intention dans certains cas :
      • état clinique instable
      • trouble de la conscience
      • céphalée « en coup de tonnerre »
      • suspicion de méningoencéphalite, abcès ou empyème avec une porte d'entrée ORL, en l'absence de signe neurologique focal
    • dans ces situations, il est l'examen de 1e intention en raison de :
      • sa rapidité et facilité d'acquisition
      • et sa meilleure performance diagnostique dans certaines pathologies

Avant une éventuelle imagerie, en l'absence de drapeau rouge

  • Un avis pédiatrique ou neuropédiatrique
    selon l’accès local à ces spécialistes
    (en consultation) est indiqué si :
    • difficulté d'obtention d'une anamnèse ou d'un examen clinique fiable
    • doute diagnostique
    • céphalée réfractaire à un traitement approprié
    • céphalée chronique (> 3 mois)
  • Un avis ophtalmologique est indiqué si :
    • céphalée chronique (> 3 mois)
    • céphalée d'asthénopie
      • typiquement déclenchée par le travail de près
      • vespérale
      • présente les jours d'école
      • et de moindre intensité, voire absente, pendant les vacances
    • céphalée accompagnée de symptôme visuel hors drapeau rouge ou aura visuelle typique

Après l'imagerie

  • En cas d'imagerie cérébrale préconisée en 1e intention normale :
    • en présence de signes d'hypertension intracrânienne (HTIC) sans cause évidente à l'IRM cérébrale : poursuivre les explorations en milieu hospitalier (avec avis neuropédiatrique et ophtalmologique pour réalisation d'un fond d'œil)
    • en cas de céphalée réfractaire à un traitement approprié : une consultation pédiatrique ou neuropédiatrique est indiquée
  • En cas d'anomalie à l'imagerie cérébrale, l'indication d'un avis spécialisé dépend du diagnostic radiologique (Tableau 2).
Tableau 2. Indication d'un avis spécialisé en cas d'anomalie à l'imagerie recommandée
Diagnostic radiologique Indication d'un avis spécialisé Degré d'urgence de l'avis spécialisé
Tumeur
Abcès
Malformation artérioveineuse
Anévrysme
Hydrocéphalie
Avis neurochirurgical En urgence
Thrombophlébite cérébrale
AVC ischémique
Avis neuropédiatrique et/ou neurovasculaire En urgence ( nota
​ L’œdème papillaire qui résulte de l'HTIC peut entraîner une perte définitive de la vision en l’absence de prise en charge.
)
HTIC idiopathique Avis neuropédiatrique En urgence
Malformation de Chiari de type I
​variation morphologique cérébrale caractérisée par une descente des amygdales cérébelleuses d’au moins 5 mm à travers le foramen magnum.
symptomatique
Avis neurochirurgical Sans urgence
Opacité complète d'un sinus ou signe de sinusite chronique en présence de signes cliniques rhinosinusiens Un avis ORL peut être indiqué Sans urgence
Incidentalome :
  • kyste arachnoïdien ou de la glande pinéale
  • hypersignaux de la substance blanche
  • opacité partielle des sinus...

Dans la majorité des cas, ces incidentalomes n'ont pas de valeur pathologique, mais certains nécessitent une prise en charge spécifique.

En cas de doute, un avis peut être demandé auprès du radiologue, du neuropédiatre ou du neurochirurgien.

Figure 1. Arbre décisionnel pour les médecins généralistes et pédiatres de ville : céphalées de l'enfant et l'adolescent : indications de l'imagerie cérébrale