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ebm00792
2022/02
2022/07
Guides de pratique clinique
Adapté au contexte français par l’équipe éditoriale
Migraine
7/11/2025
Libre d'accès
Thème : Neurologie

  • La migraine est une maladie neurovasculaire paroxystique. Parmi plusieurs médiateurs, la protéine connue sous le nom de peptide relié au gène de la calcitonine (CGRP) joue un rôle dans le développement de la douleur migraineuse.
  • La prévalence de la migraine dans la population adulte est d'environ 10 %, 5 % chez l'homme et 15 % chez la femme.
  • Selon la classification internationale ICHD-3, les crises de migraine sont classées en crises sans aura (85 %) et crises avec symptômes prodromiques, ou aura (15 %). Ces dernières consistent en des crises typiques avec aura visuelle et des types plus rares de migraine avec aura, comme la migraine avec aura du tronc cérébral, la migraine hémiplégique et la migraine rétinienne
    symptômes visuels strictement monoculaires​, atypiques (CEN)
    .
    • Une aura visuelle est généralement un bref symptôme visuel positif
      avec scotome scintillant/phosphènes mais peut aussi être déficitaire avec vision floue (CEN)
      précédant la douleur.
    • Les symptômes d'aura plus rares sont des symptômes du tronc cérébral, tels que des vertiges, des engourdissements, des troubles de la parole ou de la déglutition ou des symptômes de paralysie motrice.
  • Les facteurs précipitant les crises de migraine comprennent l’accumulation de stress, la perturbation du rythme veille-sommeil, l'hypoglycémie et, chez les femmes, la baisse des taux d'œstrogènes pendant les menstruations ou pendant les pauses de prise de contraceptifs oraux combinés.

  • Une crise de migraine est divisée en stade prémonitoire, aura, stade de mal de tête et stade postdrome.
  • Chez l'adulte la durée d'une crise de migraine est de 4 à 72 heures.
  • Pendant quelques jours avant la crise et après celle-ci, un changement de vigilance est possible.
  • Les symptômes typiques comprennent le bâillement, un besoin impérieux de sucreries, la fatigue et l'irritabilité.
  • Le stade de la céphalée peut être précédé d'une aura ou de symptômes prodromiques qui durent de 5 à 60 minutes.
    • Une aura visuelle usuelle est un scotome agrandi et scintillant avec des marges claires, une zone grise ou claire avec des bords dentelés.
    • L'aura peut également se manifester par une perturbation sensorielle unilatérale, une difficulté à trouver ses mots ou une paralysie motrice.
  • Une aura migraineuse peut survenir sans céphalée ultérieure.
  • La migraine est une céphalée pulsatile, souvent unilatérale, sévère ou modérée, qui s'aggrave à l'effort. On peut en outre observer des nausées ou des vomissements ainsi qu'une sensibilité sensorielle générale accrue (à la lumière, aux sons, aux odeurs).
  • La crise est associée à des troubles du système nerveux autonome. Pendant la crise, le patient cherche à s’allonger dans une pièce sombre, fraîche et silencieuse.

Critères diagnostiques

Tableau 1. Critères diagnostiques de la migraine avec aura typique
Migraine avec aura typique (1.2.1) – Critères modifiés de l'ICHD-3
A Au moins deux crises remplissant les critères B et C
B Aura composée de symptômes visuels, sensoriels et/ou du langage/de la parole, chacun complètement réversible, mais sans symptôme moteur, rétinien ou du tronc cérébral
C Au moins deux des quatre caractéristiques suivantes :
  1 au moins un symptôme d'aura s'étend progressivement sur ≥ 5 min et/ou deux symptômes ou plus apparaissent successivement
  2 chaque symptôme d'aura individuel dure au moins 5 minutes mais moins de 60
  3 au moins un symptôme d'aura est unilatéral
  4 l'aura est accompagnée ou suivie par des céphalées dans les 60 minutes
D Ne se justifie par aucun autre diagnostic ICHD-3, et l’accident ischémique transitoire (AIT) aura été exclu .

Diagnostic différentiel

​​​Les critères diagnostiques ICHD-3 de la migraine sans aura sont les suivants :

A Au moins 5 crises répondant aux critères B-D
B Crises de céphalées durant de 4 à 72 heures (si non traitées ou inefficacement traitées)
C Céphalées ayant au moins deux des quatre caractéristiques suivantes : 
1. topographie unilatérale
2. type pulsatile
3. intensité modérée ou sévère
4. aggravée par ou entraînant  l'évitement des activités physiques de routine (marcher, monter les escaliers)
D Durant la céphalée, au moins l'un des suivants : 
1. nausée et/ou vomissement
2. photophobie et phonophobie
E N'est pas mieux expliquée par un autre diagnostic de l'ICHD-3
 
voir aussi les critères "non modifiés" pour la migraine avec aura : CEN tableau 10-3, paragraphe diagnostic de la migraine

Migraine

  • Dans l'hémorragie sous-arachnoïdienne, la douleur a un début explosif et est souvent associée à une diminution du niveau de conscience .
  • La méningite se caractérise par une raideur de la nuque, de la fièvre, une diminution du niveau de conscience et une confusion, en plus des maux de tête.

    Guide de pratique clinique

    Méningite chez l’adulte

    .
  • L'algie vasculaire de la face provoque une douleur brève et intense d'une durée de 15 à 180 minutes dans la région d'un œil et est associée à un larmoiement .
  • La céphalée de tension consiste généralement en un simple mal de tête sans autres symptômes, une douleur bilatérale oppressante, sans symptômes prodromiques, nausées ou sensibilité sensorielle ; l'exercice améliore l'état.

    Guide de pratique clinique

    Céphalée de tension

    .

Migraine avec aura

  • Crise d’épilepsie du lobe temporal.
  • Lors d'une crise d’épilepsie du lobe occipital, les troubles visuels sont plus colorés, plus « électriques » et d'une durée plus courte qu'en cas de migraine.
  • Le début d'une crise d'AIT est soudain (dans un AIT vertébro-basilaire, il existe un défaut de champ visuel sombre, pas de sensations visuelles lumineuses, pas d'expansion lente, généralement pas de mal de tête)

    Guide de pratique clinique

    Accident ischémique transitoire (AIT)

    .
  • Dans un glaucome aigu, il existe une douleur intense de l’œil, qui peut être dur à la palpation

    Guide de pratique clinique

    Glaucome

    .

  • Repos dans un environnement calme, tranquille et sombre.
  • Au début de la phase de céphalée d'une crise de migraine, un antalgique doit être pris dès l'apparition d' une douleur légère, soit du paracétamol, un AINS ou un triptan (comprimé, spray nasal ou injection sous-cutanée). Les triptans peuvent être associés à d'autres antalgiques.
  • Le paracétamol ou un AINS peuvent être pris dès le stade de l'aura, mais les triptans, en revanche, ne doivent pas encore être pris à ce stade.
  • Un triptan injecté par voie sous-cutanée est rapidement absorbé et efficace même en cas de douleur intense. Les comprimés commencent généralement à faire effet dans l'heure qui suit. Dans les crises prolongées, des doses répétées sont nécessaires. Deux doses de triptans peuvent être prises dans les 24 heures.
  • Les contre-indications aux triptans doivent être respectées.
  • L'association de 10 mg/jour de métoclopramide avec d'autres médicaments utilisés pour traiter les crises de migraine améliore leur absorption.

    SFEMC 2021 précise la stratégie thérapeutique lors des crises migraineuses :

    • médicaments en fonction de la situation :
      • céphalée légère : AINS et en cas de réponse insuffisante après une heure : ajouter un triptan
      • céphalée modérée ou sévère : triptan et en cas de réponse insuffisante après une heure : ajouter un AINS
      • migraine avec aura : AINS au début de l'aura et triptan au début de la céphalée
    • voie d'administration en cas de troubles digestifs à adapter, par exemple : AINS par voie intra-musculaire, triptan par voie nasale ou sous-cutanée.
     
    • éviter les opioïdes pour éviter les abus médicamenteux avec risque de céphalées chroniques.
    • Le métoclopramide est conseillé en cas de nausées ou vomissements invalidants. Selon HAS 2022métoclopramide est réservé aux situations dans laquelles la prescription d'un antiémétique apparaît indispensable au risque d'effets indésirables parfois graves. 

Paracétamol et AINS

Triptans

Autres médicaments

  • Diazépam
    ​Non recommandé dans les références françaises et pas d'AMM​ dans cette indication (BDPM)
    2–10 mg par voie orale/rectale
  • Les opioïdes ne sont pas utilisés dans le traitement de la migraine. Leur efficacité n'est pas supérieure à celle des AINS, et ils sont associés à un risque de pharmacodépendance et de céphalée de rebond due aux antalgiques.

Médication pendant la grossesse et l'allaitement

  • On peut utiliser le paracétamol pendant la grossesse. Ibuprofène et naproxène peuvent être utilisé en début de grossesse
    Utilisation ponctuelle envisageable avant 24 SA uniquement CRAT (Contre-indication formelle après 24 SA)
  • Les triptans sont contre-indiqués pendant la grossesse et l’allaitement. L'utilisation occasionnelle de sumatriptan (moins de 4 fois) pendant la grossesse n'est probablement pas nocive.
    Si un triptan est nécessaire, le sumatriptan pourra être utilisé quel que soit le terme (CRAT)
    Le sumatriptan est connu pour être excrété dans le lait maternel en petites quantités ; les doses conventionnelles ne devraient pas engendrer de préjudice au nourrisson.

Migraine menstruelle

  • La migraine menstruelle est un type de migraine sans aura qui débute entre 2 jours avant ou 2 jours après le premier jour de saignement.
  • Le début de la crise est associé à une baisse rapide des niveaux d'œstrogène.
  • La migraine menstruelle peut être prolongée et intense.
  • Si la migraine menstruelle survient régulièrement, les éléments suivants peuvent être utilisés à titre prophylactique :
    • Naproxène 500 mg deux fois par jour en commençant 2 jours avant la période menstruelle et en continuant jusqu'à la fin de la période (au maximum pendant 7 jours).
    • Débuter la prise de triptans 1 à 2 jours avant les règles et continuer pendant 5 à 7 jours, à condition que le cycle menstruel et la migraine associée soient très réguliers. Les médicaments à cette fin comprennent :
      • frovatriptan 2,5 mg deux fois par jour
      • zolmitriptan 2,5 mg trois fois par jour
      • naratriptan 2,5 mg deux fois par jour

Traitement de la crise migraineuse aiguë et prolongée

  • L'état de mal migraineux est une crise de migraine accompagnée de symptômes sévères persistant pendant plusieurs jours.
  • Le traitement doit être débuté sans délai aux urgences si un patient signale ses symptômes typiques de migraine et qu'aucune cause secondaire n'est suspectée.
  • Les triptans injectés par voie sous-cutanée agissent rapidement.
  • Les analgésiques et les antiémétiques doivent être administrés par voie parentérale.
  • On peut administrer 500 mg d'hydrocortisone et 200 mg d'indométacine avec 1 000 ml de chlorure de sodium à 0,9 % et une solution de glucose à 5 % (NaCl 0.9/G5) par voie intraveineuse pendant 6 à 8 heures.
  • À sa sortie, le patient doit être invité à contacter les soins ambulatoires pour réviser son plan de traitement de la migraine.
  •  

Selon la SFEMC 2022 :
  • L'indication d'un traitement préventif médicamenteux est à envisager dans les situations suivantes : 
    • à partir de 8 jours de traitements de crises par mois pendant 3 mois. 
    • migraine chronique, migraine sévère
    • ≥ 60 à l'échelle HIT 
    • crises de migraine invalidantes malgré l’optimisation du traitement de crise
  • En cas de migraine épisodique (<15 jours/mois) : 
    • 1e intention : propranolol ou métoprolol
    • en cas de contre-indication aux béta-bloquants ou d’échec thérapeutique : amitriptyline ou topiramate* (avec formulaire d'accord de soins chez les femmes) ou candésartan (hors AMM BDPM) 
  • En cas de migraine chronique (> 15 jours/mois) :
    • 1e intention : topiramate* (avec formulaire d'accord de soins chez les femmes)
    • 2e intention : lire dans la recommandation
*Le topiramate est contre-indiqué en cas de grossesse. Sa prescription initiale est réservée aux neurologues et aux pédiatres chez les adolescentes et les femmes en âge de procréer et nécessite un formulaire d’accord de soins.
 

Intervention en cas de céphalées chroniques quotidiennes

  • Une migraine chronique ou un mal de tête quotidien chronique peut être diagnostiqué s'il y a eu 15 jours ou plus de maux de tête par mois pendant 3 mois.
  • Il s'agit souvent d'une combinaison de migraine chronique, de céphalée de tension et d'abus de médicaments.
  • Si une céphalée d'origine médicamenteuse est identifiée, il est nécessaire de réduire une surconsommation de médicaments contre la migraine ou d'arrêter ou de sevrer le patient des médicaments. Dans le même temps, il est recommandé de commencer une prophylaxie de la migraine.
  • Lorsque les analgésiques sont réduits progressivement sur 1 à 3 semaines, une absence pour maladie peut être nécessaire pendant les premiers jours.
  • Lors de la planification d'un traitement ultérieur, une prophylaxie non pharmacologique et pharmacologique de divers types de maux de tête doit être envisagée. Le patient doit être invité à documenter l'utilisation de médicaments contre les maux de tête et de médicaments de secours.
  •  

  • La migraine commence souvent à l'âge scolaire.
  • Si les crises de migraine sans aura persistent à l'âge adulte, chez la femme, la fréquence diminue pendant la grossesse et les crises cessent souvent complètement après la ménopause.
  • La migraine avec aura peut s'intensifier pendant la grossesse et chez les patientes ménopausées sous œstrogénothérapie substitutive.
  • La migraine avec aura est associée à un risque d'infarctus cérébral qui est augmenté par l'utilisation de contraceptifs oraux combinés
    ​la contraception oestro-progestative est contre-indiquée en cas de migraine avec aura. ​(SFEMC 2021: femmes migraineuses​​)
    et le tabagisme

    Guide de pratique clinique

    Sevrage tabagique

    .

  1. Oiseau S, Derry S, Moore RA. Zolmitriptan for acute migraine attacks in adults. Cochrane Database Syst Rev 2014;(5):CD008616. PubMed
  2. Loi S, Derry S, Moore RA. Sumatriptan plus naproxen for the treatment of acute migraine attacks in adults. Cochrane Database Syst Rev 2016;4():CD008541. PubMed
  3. Linde M, Mulleners WM, Chronicle EP et al. Gabapentin or pregabalin for the prophylaxis of episodic migraine in adults. Cochrane Database Syst Rev 2013;(6):CD010609. PubMed
  4. Kirthi V, Derry S, Moore RA. Aspirin with or without an antiemetic for acute migraine headaches in adults. Cochrane Database Syst Rev 2013;(4):CD008041. PubMed
  5. Rabbie R, Derry S, Moore RA. Ibuprofen with or without an antiemetic for acute migraine headaches in adults. Cochrane Database Syst Rev 2013;(4):CD008039. PubMed
  6. Loi S, Derry S, Moore RA. Naproxen with or without an antiemetic for acute migraine headaches in adults. Cochrane Database Syst Rev 2013;(10):CD009455. PubMed
  7. Derry S, Moore RA. Paracetamol (acetaminophen) with or without an antiemetic for acute migraine headaches in adults. Cochrane Database Syst Rev 2013;(4):CD008040. PubMed
  8. Linde M, Mulleners WM, Chronicle EP et al. Topiramate for the prophylaxis of episodic migraine in adults. Cochrane Database Syst Rev 2013;(6):CD010610. PubMed
  9. Derry CJ, Derry S, Moore RA. Sumatriptan (oral route of administration) for acute migraine attacks in adults. Cochrane Database Syst Rev 2012;(2):CD008615. PubMed