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Guides de pratique clinique
Insomnie
21/11/2022
Libre d'accès

  • Il n'existe généralement pas de cause unique à l'insomnie. En plus des causes médicales, on observe un certain nombre de facteurs connus pour y contribuer, dont certains traits de personnalité, les habitudes de vie et les situations de vie.
  • La forme la plus fréquente est l'insomnie déclenchée par un changement dans la situation de vie du patient.
  • Si le patient réagit à l'insomnie par l'inquiétude, elle peut conduire à un ​état​ d'hypervigilance​, qui à son tour ​perpétuera l'insomnie (chronique) (insomnie fonctionnelle).
  • L'anamnèse minutieuse est essentielle à l'évaluation et le journal du sommeil est un outil supplémentaire utile.
  • Une bonne relation médecin-patient et une approche non pharmacologique constituent la clé de voûte du traitement.

  • On signale une insomnie transitoire chez un tiers de la population adulte et l'insomnie chronique, chez seulement moins d'un dixième.
  • L'insomnie est également fréquente chez l'enfant et l'adolescent.
  • L'insomnie est plus fréquente chez la femme que chez l'homme et ​​et sa fréquence augmente avec l'âge.

  • Les symptômes sont dus à une série de facteurs  :
    • facteurs prédisposants (antécédents familiaux d'insomnie, hyperexcitabilité, c.-à-d. un « dormeur au sommeil léger », traits de personnalité, schémas comportementaux)
    • facteurs déclencheurs (effort/stress chronique ou aigu au travail ou dans une autre situation de vie, modification de l'état de santé)
    • facteurs aggravants (mécanismes de l'insomnie psychophysiologique, voir ci-dessus, modifications des habitudes de sommeil conduisant à l'insomnie, par ex., heure du coucher trop précoce, temps excessif passé au lit ou recours accru aux stimulants par la caféine)
  • Il est difficile pour les insomniaques d'estimer avec précision la durée du sommeil léger et interrompu (la durée moyenne de sommeil est souvent significativement sous-estimée).
  • Un stimulant, même en faible quantité, peut influencer le sommeil.
    • La caféine (antagoniste de l'adénosine) peut nuire au sommeil, en particulier chez les personnes sensibles, quel que soit le moment de la consommation.
    • Les fumeurs dorment moins bien que les non-fumeurs.
    • Une quantité d'alcool, même assez faible (< 3 unités) rend le sommeil plus léger et réduit son effet réparateur.
  • L'insomnie est un symptôme fréquent des situations de vie stressantes et de presque tous les troubles psychiatriques.
  • Chez la personne âgée, l'insomnie est associée en particulier à d'autres pathologies concomitantes (insomnie comorbide), alors que chez la personne d'âge moyen, les facteurs psychosociaux ont un impact majeur (en lien, par ex., avec le travail ou la famille).
  • De nombreux troubles physiques sont également associés à l'insomnie, par exemple :
  • Causes psychiatriques
    • dépression
    • anxiété
    • psychose
    • manie
  • Causes chronobiologiques
    • habitudes de sommeil irrégulières (par ex., la phase de sommeil et sa durée varient de façon excessive entre les jours de la semaine et le week-end)
    • travail posté et autres horaires de travail inhabituels ou longs
    • retard de phase du sommeil : le patient ne s'endort pas avant tard dans la nuit, mais, s'il n'est pas perturbé, il dormira normalement.
  • Certains médicaments peuvent également être à l'origine de l'insomnie, par exemple :
    • anxiolytiques : benzodiazépines, buspirone
    • statines
    • AINS
    • anti-asthmatiques : ​​bêta2-mimétiques​, aminophylline, théophylline
    • ​médicaments utilisés dans le traitement des troubles neurocognitifs : donépézil, rivastigmine
    • antiépileptiques : phénytoïne, lamotrigine, lévétiracétam, topiramate
    • stimulants du SNC : amphétamines, atomoxétine, bupropion, buspirone, caféine, méthylphénidate, nicotine, pseudoéphédrine, éphédrine, modafinil
    • antidépresseurs : fluoxétine, fluvoxamine, paroxétine, trazodone et autres ISRS, inhibiteurs de la MAO-A, duloxétine, mirtazapine (plus de 30 mg)
    • antiparkinsoniens : ​agoni​stes dopaminergiques, lévodopa, inhibiteurs de la MAO-B
    • antipsychotiques : antipsychotiques classiques (dérivés de la phénothiazine)
    • glucocorticoïdes
    • thyroxine
  • L'insomnie idiopathique est rare ; elle commence pendant l'enfance ou pendant l'adolescence et n’a aucune autre cause identifiable. Le patient a des antécédents familiaux et la cause de la maladie est organique, provenant du système nerveux central.

  • L'évaluation repose sur une anamnèse minutieuse .
    • manifestation : difficulté à s'endormir (insomnie initiale), réveils nocturnes (insomnie du milieu de la nuit), réveil trop précoce (insomnie terminale) et/ou sommeil non réparateur
    • rapidité de l'endormissement, réveils répétés (cause ?), capacité à se rendormir, sensation de repos au réveil ?
    • temps passé au lit par rapport à la durée du sommeil
    • début, durée et évolution de l'insomnie, éventuels changements dans les symptômes et leurs causes
    • perception du patient quant à la cause de son insomnie
    • modalité du sommeil avant l'apparition des symptômes
    • évaluation subjective de la quantité de sommeil nécessaire
    • environnement du sommeil
    • effet sur le bien-être et la performance le lendemain
      • degré de fatigue (coups de fatigue, ou bien le patient est-il somnolent ?)
      • siestes pendant la journée
      • attention, concentration, mémoire, prédisposition aux accidents et aux erreurs
      • humeur (​dépression ou dysphorie induite par l'insomnie ?)
      • perceptions physiques
  • Estimer si le patient présente des symptômes qui indiquent un trouble du sommeil :
    • symptômes présents au moins trois jours par semaine
    • qui altèrent la capacité fonctionnelle diurne
    • l'indice de sévérité de l'insomnie (ISI) permet d'évaluer sa gravité
  • L'examen clinique et le diagnostic différentiel visent à détecter ou exclure par ex. un autre trouble du sommeil (en particulier l'apnée du sommeil et le syndrome des jambes sans repos), une maladie psychiatrique, l'insomnie d'origine médicamenteuse et les causes somatiques.
  • En cas d'insomnie ordinaire, il n'est généralement pas nécessaire de procéder à l'examen du sommeil (polysomnographie) ou aux analyses biologiques .
  • En cas de possibilité d'apnée du sommeil (en particulier chez les patients qui présentent une surcharge pondérale ou une rétrognathie, des ronflements ou des apnées apparaissant toutes les nuits), envisager une polysomnographie nocturne.
    • le patient atteint d'apnée du sommeil souffre généralement davantage de ​crises​ de somnolence et de fatigue diurne que d'insomnie

  • ​Une bonne relation médecin-patient est essentielle pour le traitement : la plupart des patients tirent déjà bénéfice de quelques consultations et visites de suivi.​
  • Groupes d’entraide et facteurs environnementaux (hygiène du sommeil) :
    • environnement de sommeil, habitudes de sommeil et horaire de sommeil régulier
    • fonctionnement pendant les heures d'éveil et heure du réveil
    • stimulants
  • Traitement non pharmacologique
    • Il comprend une évaluation des habitudes de sommeil du patient et des facteurs provoquant l'insomnie, ainsi que des interventions actives :
      • évaluation du mode de vie
      • exercice physique
      • relaxation
      • contrôle du stimulus du sommeil
      • limitation du temps passé au lit
    • Les interventions cognitivo-comportementales explorent les fonctions mentales du patient, leur effet sur ​l'insomnie, ainsi que l'effet que les changements provoqués par ce traitement sur le comportement et le fonctionnement ont sur ​le bien-être du patient.
    • Le traitement par le contrôle du stimulus est la méthode la plus étudiée et la plus efficace, la restriction de sommeil peut s'avérer efficace et la relaxation donne de bons résultats.
  • Pharmacothérapie

  • Insomnie transitoire (< 1 mois) et à court terme (1 à 3 mois)
    • Découvrir et soulager la cause de l'insomnie (par ex. apporter un soutien en cas de situation de vie difficile et si nécessaire, donner un congé maladie de courte durée)
    • Débuter un traitement en respectant les principes de thérapie non pharmacologique si les symptômes sont difficiles à soulager.
    • Si une bonne hygiène de sommeil ne suffit pas, envisager une médication brève aux inducteurs de sommeil.
  • Insomnie primaire chronique (> 3 mois ; il s'agit souvent d'insomnie fonctionnelle ou un type d'insomnie qui en dégage les caractéristiques évidentes)
    • Les interventions cognitives sont le traitement de première intention, car elles ciblent les facteurs perpétuants et leur efficacité persiste même après l'arrêt du traitement .
    • Il est possible de réaliser un traitement non pharmacologique en soins primaires E
    • On pourrait aussi envisager le traitement d’une affection sous-jacente en traitement de l'insomnie (par ex., un antidépresseur contre la dépression, un analgésique contre la douleur ou un agoniste dopaminergique contre le syndrome des jambes sans repos).

  1. Kronholm E, Partonen T, Härmä M et al. Prevalence of insomnia-related symptoms continues to increase in the Finnish working-age population. J Sleep Res 2016;25(4):454-7. PubMed
  2. Davidson JR, Dickson C, Han H. Cognitive behavioural treatment for insomnia in primary care: a systematic review of sleep outcomes. Br J Gen Pract 2019;69(686):e657-e664. PubMed
Auteurs : Hublin, Christer